Auteur : Amnesty International
Type de publication: Rapport
Date de publication: 2015
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Lors des manifestations liées aux elections de 2015 en avril et mai 2015, les partis d’opposition ont organisé une série de manifestations à conakry et dans d’autres grandes villes, notamment à labé, en moyenne guinée, pour réclamer la modification du calendrier électoral et la tenue d’élections locales avant les élections présidentielles . Au cours de ces manifestations et immédiatement après, au moins six personnes, des manifestants mais aussi des passants, sont mortes, plus de 100 ont été blessées et des centaines de personnes ont été arrêtées.
Des désaccords sur le calendrier électoral et sur la décision d’organiser les élections présidentielles avant les élections locales sont à l’origine des manifestations. selon les groupes d’opposition, le mandat des autorités locales, proches du parti au pouvoir ou nommées par le gouvernement, a expiré ; leur confier l’organisation d’une élection présidentielle serait donc injuste et influerait les électeurs en faveur du président sortant, alpha condé3 . des militants politiques ayant organisé ces manifestations à conakry ont expliqué à amnesty international qu’ils avaient rassemblé des habitants de leur quartier, notamment kaloum, matam, hamdallaye et bambéto, les 13, 20 et 23 avril et les 4 et 7 mai 2015, à la suite d’appels des partis d’opposition à descendre dans la rue. plusieurs groupes se sont dirigés vers différents lieux de manifestation, notamment des mairies, des sièges de partis politiques et sur la route principale qui relie le centre-ville de Conakry à ses banlieues (rue « le prince4 »).
Ce scénario concorde avec les informations que des policiers ont transmises à Amnesty International sur leurs opérations de maintien de l’ordre en avril et mai 2015. Selon eux, les autorités considèrent que ces manifestations étaient « non autorisées » puisqu’elles n’en avaient pas été notifiées
Chaque groupe comptait entre quelques individus et 150 membres, hommes, femmes et enfants. certains organisateurs ont reconnu ne pas avoir notifié les autorités locales à l’avance de la tenue de ces manifestations, contrairement à ce qu’exige le code pénal guinéen, car ils ne leur reconnaissent pas de légitimité . des manifestants ont déclaré à amnesty international que la police et la gendarmerie avaient systématiquement eu recours à une force excessive : jets de pierres, gaz lacrymogène, tirs à balles réelles, coups de matraques pour empêcher la population de rejoindre les lieux de rassemblement, etc. la police et la gendarmerie ont dispersé les rassemblements et pourchassé les manifestants dans leur quartier, entraînant des heurts entre manifestants, contre-manifestants proches du parti au pouvoir et forces de sécurité.
Des militants politiques et des chefs de groupes d’opposition ont expliqué que malgré leurs appels à manifester pacifiquement, certains contestataires avaient fait usage de la violence ou commis d’autres infractions pénales. amnesty international a recueilli des témoignages de témoins oculaires et a visionné des séquences vidéo indiquant que certains manifestants et contre-manifestants avaient jeté des pierres en direction des forces de sécurité, bloqué des routes publiques en brûlant des pneus et saccagé des magasins. d’après le gouvernement, les manifestants auraient blessé 30 policiers et gendarmes et auraient déversé de l’huile sur les chaussées, causant des accidents de voiture.
Ce scénario concorde avec les informations que des policiers ont transmises à Amnesty International sur leurs opérations de maintien de l’ordre en avril et mai 2015. Selon eux, les autorités considèrent que ces manifestations étaient « non autorisées » puisqu’elles n’en avaient pas été notifiées. Lorsque des groupes d’opposition lancent des appels à manifester dans les médias, la police déploie des agents des forces de l’ordre et des équipements antiémeutes sur les lieux habituels de manifestation pour empêcher tout rassemblement non autorisé.
Ils interpellent les manifestants pour les disperser et poursuivent et arrêtent ceux qui commettent des infractions. Les policiers ont admis que la force peut être utilisée à tout moment. Même une fois le rassemblement dispersé, les policiers peuvent continuer à poursuivre des manifestants, en travaillant en collaboration avec des patrouilles mobiles pour les pourchasser dans leur quartier et leur maison.
C’est ainsi que des manifestants et des passants, notamment des enfants, ont été blessés ou tués. Un grand nombre des victimes semblent avoir été tuées ou blessées par balles
Les récits de la police et des manifestants diffèrent sur la question de savoir qui a eu recours à la force en premier, et ce de quelle façon. Les policiers interrogés par Amnesty International ont déclaré que les forces de sécurité avaient recouru à la force parce que des manifestants avaient ignoré leurs injonctions à se disperser et avaient commencé à jeter des pierres. Ils ont précisé que les forces de sécurité qui participaient aux opérations de maintien de l’ordre n’avaient utilisé que des équipements anti-émeutes, c’est à dire du gaz lacrymogène et des matraques.
Ils ont insisté sur le fait que les forces de sécurité n’étaient pas autorisées à porter d’armes à feu, ni à en utiliser, et qu’il était de la responsabilité du commandant des unités déployées de s’assurer que les membres des forces de sécurité sous son autorité respectaient cette règle. Toutefois, les policiers ont également précisé que les patrouilles mobiles, des unités spécialisées comme la brigade anti-crime qui sont parfois appelées en renfort pour pourchasser et arrêter des manifestants, peuvent, elles, porter des armes à feu.
Or, selon des organisateurs des manifestations, de nombreux témoins oculaires, des professionnels de la santé et des avocats, ainsi que des photos et des séquences vidéo rassemblées par Amnesty International, il semble qu’au cours des manifestations d’avril et de mai 2015, les membres des forces de sécurité ont à plusieurs reprises porté des armes à feu et eu recours à la force, y compris meurtrière, sans aucun avertissement. Dans plusieurs cas, leur réponse semble avoir été excessive, soit parce qu’il n’était pas nécessaire d’utiliser une telle force pour contenir quelque violence que ce soit, soit parce que la force utilisée était disproportionnée par rapport aux dommages qu’elle visait à empêcher c’est ainsi que des manifestants et des passants, notamment des enfants, ont été blessés ou tués.
Un grand nombre des victimes semblent avoir été tuées ou blessées par balles. les professionnels de la santé interrogés par amnesty international ont indiqué avoir recensé au moins 38 personnes, manifestants ou passants, blessées par balles lors des manifestations à conakry entre avril et mai 2015. ils ont notamment relevé des fractures des membres et diverses lésions thoraciques. quatre des six personnes tuées durant les manifestations sont décédées en raison de blessures par balles. dans de nombreux cas, les blessés ont indiqué au personnel médical avoir essuyé des tirs des forces de sécurité.
Amnesty International s’inquiète également d’informations selon lesquelles les forces de sécurité ont eu recours arbitrairement à la force contre des journalistes qui couvraient les manifestations. Depuis l’intensification des manifestations contre le calendrier électoral, plusieurs journalistes et certains médias ont dénoncé le traitement dont ils ont été victimes alors qu’ils couvraient les manifestations, notamment les insultes et les coups des agents responsables de l’application des lois .
Le 7 mai 2015, Ibrahima Sory Diallo, Cellou Binani Diallo et Youssouf Bah se sont rendus à Cosa, à Conakry, pour interroger des personnes sur le recours excessif à la force par les forces de la gendarmerie et de la police lors des manifestations. L’un des journalistes a expliqué que la situation sur place était marquée par des heurts entre manifestants et membres des forces de police. Les journalistes ont commencé à rassembler des informations.
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