Auteurs : Stéphanie Maltais1, Salifou Talassone Bangoura, Rolly Nzau Paku, Marlène Metena Mambote, Castro Hounmenou, Simon Rüegg, Justin Masumu, Rodrigue Deuboué Tchialeu, Sheila Makiala, Abdoulaye Touré, Alioune Camara, Alpha Kabinet Keita, Sanni Yaya
Site de publication : International Health trends and perspectives
Type de Publication : Article
Date de publication : Décembre 2022
Lien vers le document original
*Les Wathinotes sont des extraits de publications choisies par WATHI et conformes aux documents originaux. Les rapports utilisés pour l’élaboration des Wathinotes sont sélectionnés par WATHI compte tenu de leur pertinence par rapport au contexte du pays. Toutes les Wathinotes renvoient aux publications originales et intégrales qui ne sont pas hébergées par le site de WATHI, et sont destinées à promouvoir la lecture de ces documents, fruit du travail de recherche d’universitaires et d’experts.
Introduction
L’émergence et la réémergence des maladies zoonotiques provoquant des épidémies récurrentes ont augmenté ces deux dernières décennies en raison de facteurs anthropiques, tels que le commerce international, les mouvements de populations humaines et animales et la perturbation des écosystèmes par les activités humaines ; qui ne sont ni plus ni moins que les conséquences de la croissance démographique mondiale et de la mondialisation. Environ deux-tiers des maladies émergentes affectant l’homme sont d’origine animale et la plupart d’entre elles proviennent de la faune.
La fièvre hémorragique Ebola est un exemple de maladie d’origine zoonotique, reconnue dans le monde entier comme une épidémie récurrente, à grande échelle, grave et mortelle. Plus récemment, la pandémie de COVID-19 est venue s’ajouter à cette liste. Toutes ces maladies ont causé une mortalité et une morbidité importantes, et ont laissé un impact énorme sur les systèmes de santé, la société et l’économie non seulement des pays touchés, mais aussi sur l’économie mondiale.
En Guinée, comme en République démocratique du Congo (RDC), des efforts ont été déployés pour la mise en œuvre de l’approche OH. En Guinée, dans la période post-Ébola en 2017, une plateforme nationale OH a été mise en place par un arrêté conjoint signé par les ministères de la Santé, de l’Élevage et des Productions Animales, de l’Environnement et des Eaux et a été déconcentrée jusqu’au niveau communautaire par la suite.
Bref historique de l’approche oh en Guinée et en RDC
La Guinée est le foyer écologique pour les maladies à potentiel épidémique telles que la méningite, la fièvre jaune et les fièvres hémorragiques de Lassa et d’Ébola. Le pays a connu entre 2014 et 2016 la plus grande épidémie de la maladie à virus Ébola de l’Afrique de l’Ouest et la plus virulente depuis son apparition en 1976. À la suite, plusieurs flambées de fièvres hémorragiques virales se sont succédé. Des cas aigus de la fièvre hémorragique Lassa ont été déclarés dans les préfectures de Macenta en 2018 et de Kissidougou en 2019.
La RDC, pour sa part, est le pays africain qui a signalé le plus d’épidémies. Dès les années 1970, le pays a enregistré les premiers cas de Monkeypox et de la MVE auxquels vont succéder plusieurs autres flambés épidémiques. La plus conséquente des épidémies de la MVE était celle de 2018-2019 qui a été déclarée dans la Province du Nord-Kivu et qui s’est propagée en Ituri. Elle a touché des provinces déjà fortement impactées depuis plus de 20 ans par l’insécurité générée par les affrontements entre différents groupes armés. La fièvre jaune, le Chikungunya, le choléra, la rage sont des maladies sous surveillance constamment rapportées en plus de la Covid-19.
Initiatives “Une Seule Santé” en Guinée
Cette initiative avait au départ pour mission de suivre et veiller à l’exécution des projets suivants : le projet d’appui au secteur de la santé post-Ébola (PASSP), le projet de renforcement des laboratoires (LABOGUI) via la Fondation Mérilleux, et le projet de renforcement des systèmes de surveillance des maladies (REDISSE), financé par la Banque Mondiale.
Normalement, selon le chapitre de l’arrêté, le comité de pilotage ne devait se rencontrer que deux fois par année ce qui est bien peu pour réellement opérationnaliser une collaboration multisectorielle. Cet arrêté prévoyait aussi la création de la plateforme OH au niveau de la base pour discuter, analyser, formuler des recommandations et déterminer comment travailler ensemble pour traiter des questions de santé humaine, animale et environnementale spécifiques à chaque localité.
Initiatives “Une Seule Santé” en RDC
Le projet RESOH-LABO,lancé récemment par l’Agence française de développement (AFD) et Expertise France, qui s’inscrit dans l’initiative « santé commune », vise à renforcer les capacités des laboratoires provinciaux, en améliorant l’organisation du réseau de laboratoires à l’échelle provinciale et nationale, ainsi que les capacités de surveillance épidémiologique en mettant l’accent sur les questions du genre en vue de réduire durablement les inégalités (Lancement du projet RESOH-LABO, 2022).
Aux échelles institutionnelle ou interinstitutionnelle , certaines initiatives OH ont aussi vu le jour À l’Institut National de Recherche Biomédicale (INRB), par exemple, le Programme FA 5 qui regroupe des experts de l’INRB, du Laboratoire Vétérinaire Central de Kinshasa (LCVK) ainsi que ceux de l’Institut de Médecine Tropicale (IMT) du Royaume de la Belgique dispose en son sein, dans le cadre d’une coopération interinstitutionnelle, d’une plateforme OH qui réalise des activités de surveillance, de recherche et de formation continue à l’interface « Homme – Animal ».
Des défis de coordination
En RDC, la plateforme nationale a été créée par le ministère de l’Enseignement Supérieur et Université par l’arrêté ministériel n° 405/MINESU/CABMIN/MML/CB/JN/2011 du 09 novembre 2011 sous la dénomination du Comité de Coordination Une Santé ‘CCUS). En 2022, elle est devenue Commission de Coordination Une Santé (CCUS) par l’arrêté ministériel n°188/MINESU/CABMIN/MNB/RMM/2022 du 29 avril 2022
Contrairement à la Guinée où la plateforme nationale a bénéficié de la signature des ministères impliqués dans la gestion de la santé, la plateforme nationale de la RDC (CCUS) est directement placée sous la tutelle du ministère de l’Enseignement Supérieur et Universitaire. En plus, elle ne dispose pas d’une plateforme sectorielle en santé animale ni d’une qui regroupe les corporations de la santé.
En RDC, la plateforme nationale CCUS a bénéficié de l’appui de divers PTFs pour mettre en place des comités provinciaux dans certaines provinces du pays. Cette décentralisation est en cours et doit continuer jusqu’à couvrir les 26 provinces du pays, car actuellement moins de la moitié des provinces dispose de tels comités. De même, d’autres comités doivent être installés au niveau des territoires ainsi que dans les secteurs de la périphérie.
Quelques avancées quant aux principes de Manhattan
Au regard des réalités dans les deux pays de notre étude, une coopération Sud-Sud pourrait certainement contribuer à ce changement de paradigme en faveur d’une approche systémique et intégrée de la santé et favoriser le partage d’expertise et d’expérience.
Cela peut passer par la co-écriture de projets de recherche-action qui peuvent faire collaborer directement les plateformes OH des deux pays, soutenir les efforts déjà en cours en matière de l’approche OH et d’allier la recherche formative à la recherche interventionnelle en faisant travailler ensemble des personnes des milieux de la recherche, de la pratique et de la politique. En faisant participer les personnalités politiques, cela permettra une meilleure compréhension de OH et permettra de s’attaquer aux principales barrières politiques et culturelles qui limitent la mise en œuvre effective de l’approche OH dans les deux pays.
Commenter