L’épilepsie en Guinée-Conakry, réalités et perspectives, African and Middle East Epilepsy Journal, 2020

L’épilepsie en Guinée-Conakry, réalités et perspectives, African and Middle East Epilepsy Journal, 2020

Auteur : Ibrahima François Camara

Organisation affiliée: African and Middle East Epilepsy Journal

Type de publication : Article

Date de publication : 2020

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Réalités de l’épilepsie en Guinée-Conakry

La République de Guinée Conakry souffre d’une grave pénurie d’agents de santé, les tendances en matière de densité ne sont pas homogènes à travers les cadres d’agents de santé, avec des augmentations des densités globales pour 10 000 habitants concernant les médecins de 2005 à 2009, et de sérieuses diminutions pour le personnel infirmier et les sages-femmes au cours de la même période, les ratios de personnel sont inéquitables.

Au cours des années soixante-dix, la première unité de neurologie fut créée en combinaison avec le service de la médecine générale et le premier neurologue fut professeur Amara Cissé.

Il a fallu attendre plus de dix ans, pour voir naitre le seul service spécialisé de neurologie au sein de l’hôpital national Ignace Deen, puis quelques années après au CHU de DONKA qui était une unité de neurologie et l’année 2011 marque la naissance de l’hôpital de l’amitié sino-guinéenne (HASIGUI) à Kipé dans la commune de Ratoma à Conakry.

Faible effectif des professionnels de santé qualifiés en neurologie

Des progrès énormes ont été accomplis dans la formation spécialisée des neurologues en Guinée, malgré ces efforts nous avons 15 neurologues formés, ce qui constitue un ratio insuffisant de 850.000 personnes pour un neurologue dans le pays ; cependant ce personnel est au niveau de la capitale Conakry.

Pour pallier au manque de médecins spécialisés, les médecins généralistes aident aussi dans la prise en charge des patients épileptiques parce qu’ils sont situés en première ligne dans le système de santé et ils sont souvent implanté dans des endroits vides de neurologues. Malheureusement, la plupart de ces médecins manquent de formation dans le domaine de l’épilèptologie.

Réalités de l’épilepsie en Guinée en comparaison avec les autres pays Africains

En Guinée-Conakry, comme dans la plupart des régions en développement, l’épilepsie ne figure pas parmi les priorités de soins de santé primaire et médicaments essentiels. En effet de nombreux facteurs rendent difficile la prise en charge des personnes vivant avec épilepsie en Guinée-Conakry ; la discrimination des épileptiques, la stigmatisation de l’entourage du patient et les moins de diagnostique sont quasi-inexistant dans des zones éloignées de la capitale.

Des progrès énormes ont été accomplis dans la formation spécialisée des neurologues en Guinée, malgré ces efforts nous avons 15 neurologues formés, ce qui constitue un ratio insuffisant de 850.000 personnes pour un neurologue dans le pays ; cependant ce personnel est au niveau de la capitale Conakry

L’épilepsie a connu de grandes avancées depuis les années deux mille-dix grâce au projet GUINEA EPILEPSY, programme permettant aux personnes atteintes d’épilepsie de bénéficier d’un diagnostic et d’une prise en charge au sein du service de neurologie de Conakry.

Ce projet de l’électroencéphalographie mobile « M-EEG », est accompagné par les Etats Unis (Boston) à travers Farah Mateen, MD & PHD de la Massachusetts General Hôpital et de la Harvard Médical School, a permis de réaliser des enregistrements cérébraux grâce au bonnet EasyCap associés à des électrodes, et fait l’objet d’une évaluation scientifique par l’équipe Américaine et guinéenne.

Problèmes liés aux établissements de santé:

Le faible nombre des établissements de santé auquel s’ajoute l’éloignement des structures déjà existantes contribuent au déficit thérapeutique de l’épilepsie en Guinée Conakry.

Actuellement, la Guinée Conakry ne dispose que de deux services de neurologie, dont un seulement est spécialisé en épilèptologie, quant à leur équipement, ces deux centres ne sont pas bien équipés en électroencéphalogramme (EEG), ainsi que l’imagerie par résonnance magnétique (IRM) et tout autre matériel nécessaire pour émettre le bon diagnostic et le suivi des patients durant leur traitement ; ces équipements sophistiqués existent dans les structures sanitaires privées.

La stigmatisation et la discrimination de l’épilepsie en Guinée

L’épilepsie en Guinée-Conakry est encore trop souvent stigmatisée, du fait de la méconnaissance de la maladie et des croyances surnaturelles ou mystiques. En Afrique, les conséquences sociales et culturelles de la maladie sont extrêmement préjudiciables pour les patients épileptiques.

Le faible nombre des établissements de santé auquel s’ajoute l’éloignement des structures déjà existantes contribuent au déficit thérapeutique de l’épilepsie en Guinée Conakry

Elles peuvent être globalement résumées en un mot : rejet ou stigma. Le rejet provient également de l’entourage familial bien que les patients ne soient quasiment jamais chassés de leur maison et dorment rarement dans un lieu à part (« maladie de derrière la maison »).

Importance du gap thérapeutique en Afrique subsaharienne

En Afrique subsaharienne en général et en Guinée Conakry en particulier, rares sont des pays qui possèdent un protocole national de prise en charge de l’épilepsie et pire, de la crise épileptique prolongée de l’enfant.

Ce gap thérapeutique serait lié au manque cruel de personnels qualifiés, au prix élevés des médicaments et/ou à leur indisponibilité ainsi qu’aux croyances culturelles mystico-religieuses qui entourent encore cette maladie et aussi au circuit du patient qui sort du cadre médical le plus souvent.

Coût du traitement

Pour son coût, le phénobarbital est très accessible pour la majorité des patients Guinéens (12,5 à 25 USD) par année de traitement, mais le coût global de la prise en charge, encore largement supérieur au SMIG, ce qui contribue à rendre ce traitement difficilement accessible à la majorité des populations démunies.

En Afrique subsaharienne en général et en Guinée Conakry en particulier, rares sont des pays qui possèdent un protocole national de prise en charge de l’épilepsie et pire, de la crise épileptique prolongée de l’enfant

La Guinée-Conakry ne dispose pas une chirurgie de l’épilepsie car la décision à prendre pour la chirurgie de l’épilepsie nécessite une approche multidisciplinaire. Pour le traitement chirurgical de l’épilepsie, une collaboration sous régionale, notamment sud-sud et multidisciplinaire s’avère plus que jamais nécessaire en Afrique subsaharienne pour initier dans un bref délai et faire bénéficier nos populations de ces moyens thérapeutiques efficaces qui ne cessent d’évoluer avec des résultats de plus en plus satisfaisants dans les pays développés.

Recommandations

-La formation du personnel médical et paramédical en épilèptologie ;

-La répartition équitable du personnel médical dans tout le territoire de la Guinée-Conakry ;

-De favoriser la promotion des médicaments génériques pour de nombreux épileptiques qui vivent cachés à cause du poids social ;

-De lutter contre la souffrance néonatale et les convulsions fébriles du nourrissons en sensibilisant la population ;

-Promouvoir les centres d’écoutes des personnes vivants avec l’épilepsie et la mise en place des associations de luttes contre l’épilepsie dans toutes les régions.

Conclusion

En Guinée Conakry, l’épilepsie constitue un vrai problème de santé publique. L’ampleur de la maladie et son impact socio-économique justifient qu’une attention particulière soit portée par les autorités publiques et les partenaires au développement aux problèmes induits par l’épilepsie.

La chirurgie de l’épilepsie s’avère une nécessité absolue dans la prise en charge de l’affection malgré les particularités socioculturelles et socioéconomiques de l’Afrique sub-saharienne.

 

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