L’avenir de l’agriculture en Guinée : 2030-2063, Fonds international de développement agricole (FIDA), juillet 2021

L’avenir de l’agriculture en Guinée : 2030-2063, Fonds international de développement agricole (FIDA), juillet 2021

Auteur : Fonds international de développement agricole (FIDA)

Site de publication : Fonds international de développement agricole (FIDA)

Type de publication : Rapport

Date de publication : Juillet 2021

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*Les Wathinotes sont des extraits de publications choisies par WATHI et conformes aux documents originaux. Les rapports utilisés pour l’élaboration des Wathinotes sont sélectionnés par WATHI compte tenu de leur pertinence par rapport au contexte du pays. Toutes les Wathinotes renvoient aux publications originales et intégrales qui ne sont pas hébergées par le site de WATHI, et sont destinées à promouvoir la lecture de ces documents, fruit du travail de recherche d’universitaires et d’experts.


 

Introduction

Produire plus pour nourrir plus malgré la menace que fait peser le dérèglement climatique, mais aussi produire mieux tout en ménageant les ressources naturelles. Tels sont les défis posés par l’agriculture pour assurer la sécurité́ alimentaire des populations guinéennes dans les décennies à venir. Ces défis impliquent une agriculture performante fondée sur : un accroissement de la productivité́ sur des bases durables ; des disponibilités alimentaires stables tant en milieu urbain qu’en milieu rural ; une amélioration des revenus agricoles pour un accès aux biens de consommation et aux services non agricoles ; et un effet levier sur l’ensemble de l’économie rurale.

Un pays aux atouts considérables

  • Une position géographique stratégique : Le pays dispose de frontières communes avec six pays. Il dispose d’une façade atlantique longue de 300 km. Cette position géographique stratégique dans la sous-région lui permet de jouer un rôle de plaque tournante économique en captant une grande partie du commerce sous-régional.
  • Une dynamique démographique remarquable : La population est estimée à environ 13 millions en 2020 (8 millions en 2000). La population rurale représente 64 % et tire à 80 % l’essentiel de ses revenus des activités agricoles. La proportion de jeunes entre 15 et 34 ans représente 33 % de la population. Selon les projections des Nations Unies, la population passerait à 17 millions en 2030, 26 millions en 2050 et 35 millions en 2100.
  • Des régions agroécologiques contrastées possédant des systèmes de cultures spécifiques.
  • D’abondantes ressources en eau et en terres agricoles.
  • Des ressources biologiques forestières riches et variées : Les écosystèmes forestiers et leurs ressources subissent un processus généralisé de dégradation imputable aux facteurs anthropiques et climatiques.
  • Un secteur de la pêche aux riches ressources halieutiques et hydro-biologiques.

La position géographique stratégique de la Guinée dans la sous-région lui permet de jouer un rôle de plaque tournante économique en captant une grande partie du commerce sous-régional.

Une situation macroéconomique et sociale mitigée

  • Une faible contribution du secteur agricole au PIB contrastant avec son potentiel : Malgré une base productive riche et variée, la croissance du secteur agricole est faible et ne représente que 24 % du PIB en 2018. Les produits agricoles représentent respectivement 11 % et 17 % des exportations et des importations du pays. Les performances économiques du pays sont restées structurellement faibles avec un taux de croissance économique enregistrant une moyenne annuelle de 2.4 % à 3.4 % entre 2004 et 2013.
  • Une pauvreté et une insécurité alimentaire persistantes : Avec un revenu annuel par habitant estimé à 897 USD/hab., la Guinée est classée parmi les pays les moins avancés. La pauvreté toucherait 53 % de la population totale dont 63 % en milieu rural. La pauvreté accentue la sécurité alimentaire, avec environ 35% des ménages ruraux en insécurité alimentaire.
  • Un changement climatique impactant tous les aspects de la sécurité alimentaire et de la nutrition.

La croissance du secteur agricole est faible et ne représente que 24 % du PIB en 2018

Focus sur le développement agricole

L’agriculture est le principal secteur d’activité́ de près de 67 % de la population guinéenne et emploie 52 % de la main-d’œuvre. Elle dispose d’importants atouts qui offrent de nombreuses possibilités de croissance du secteur et d’une plus grande contribution au PIB ; bien au-delà d’assurer l’autosuffisance alimentaire. La diversité́ agroécologique, des conditions climatiques, les ressources hydrauliques et les terres agricoles disponibles confèrent à la Guinée un énorme avantage comparatif naturel dans la production d’une grande variété́ de produits vivriers et d’exportation importants ouvrant la voie à des investissements nationaux et étrangers.

L’élevage est le deuxième secteur d’activité important après l’agriculture. Il procure 30% des revenus des populations rurales.

L’industrie agroalimentaire, en pleine expansion, est investie par un ensemble composé de micro, petites et moyennes entreprises agroalimentaires (MPMEA) et d’entreprises agro-industrielles. L’essor des nouveaux modes de transformation, de distribution et de consommation alimentaires les place au cœur des chaînes de valeur alimentaire.

La croissance du secteur agricole est faible et ne représente que 24 % du PIB en 2018

Le monde rural guinéen connaît depuis longtemps diverses formes d’organisation sociale qui perdurent encore aujourd’hui. Les Organisations professionnelles agricoles (OPA) se sont constituées progressivement à partir des années 90 sur la base du développement des filières et de la gestion des intrants et des équipements agricoles suite au désengagement de l’État du secteur productif, sans pour autant que les entreprises privées prennent totalement la relève. Dans toutes les régions naturelles de la Guinée, des fédérations de producteurs se sont constituées pour rassembler les groupements de base, pour la plupart rassemblés en unions, en relation avec la promotion des filières importantes. Dans un contexte de réaffirmation des enjeux alimentaires, les OPA font figure aujourd’hui d’interlocuteurs privilégiés pour les questions de sécurité alimentaire, d’intégration des producteurs aux marchés et d’organisation de l’aide alimentaire au niveau local.

L’agriculture est le principal secteur d’activité de près de 67 % de la population guinéenne et emploie 52 % de la main-d’œuvre.

Défis et Enjeux majeurs 

  • Défi démographique : La dynamique démographique spectaculaire résulte de l’interaction de trois variables : la fécondité, la mortalité et la migration. Cette forte dynamique s’accompagne d’intenses mobilités des populations de l’intérieur vers la côte, du milieu rural vers le milieu urbain, de ville à ville et même vers les pays de la sous-région voire plus loin. L’urbanisation et la concentration géographique dans les centres urbains et périurbains sont parmi les principales résultantes de ces mobilités. Le secteur agricole et rural ne pouvant absorber qu’une part du croît démographique, ces centres sont amenés à en supporter la charge en tentant de résorber le maximum possible des nouveaux arrivants par le biais d’activités essentiellement informelles, généralement préférées à des modes de production plus intensifs et structurés. La priorité accordée à la productivité du travail est reléguée au second plan par rapport à l’objectif d’accueil du plus grand nombre. Le secteur informel se prête bien à l’offre de travail d’une main d’œuvre sans exigence de qualification ; il offre l’occasion d’un apprentissage de la division du travail peu pratiquée en milieu rural mais ne permet pas une structuration à long terme de la société.
  • Rural/Urbain : Des liens irréductibles amenés à se renforcer mutuellement. La demande urbaine joue un rôle structurant sur la géographie de l’offre de produits agricoles. L’urbanisation joue un triple rôle : elle allège la pression sur les terres agricoles, stimule les activités agricoles et accroît l’accès des consommateurs urbains aux produits agricoles. Des exploitations agricoles s’insèrent déjà̀ aux marchés urbains et fonctionnent dans une logique pleinement marchande. Ce phénomène traduit un renforcement des liens entre milieu urbain et milieu rural, un continuum rural/urbain favorable à une synergie propice à une transformation voire à une mutation du milieu rural.
  • Emploi des jeunes : Pour espérer récolter les fruits du dividende démographique, la forte population de jeunes doit être bien intégrée économiquement et socialement dans les tissus urbain et rural. La dynamique intrinsèque de ce groupe d’âge représente un atout en termes de rajeunissement, de renouvellement des forces de travail, de création d’entreprises nouvelles et de (re)vitalisation de l’économie rurale étroitement liée à l’économie urbaine combinant activités agricoles et activités non-agricoles. Dans ce cadre, de multiples perspectives et opportunités s’ouvrent aux jeunes, notamment dans l’auto emploi et l’entrepreneuriat participant aux élevages à cycle court, et aux prestations de services dans les étapes des chaines de valeur alimentaires induites par l’évolution des systèmes alimentaires en milieu urbain et périurbain (dans la production, la transformation, le transport, la commercialisation).
  • Accès aux services agricoles : En dépit de de la variété et de la richesse des environnements agroécologiques et de l’abondance des ressources naturelles, notamment en eau, l’agriculture reste peu productive, bien en deçà de son potentiel. Le défi est principalement imputable à l’amélioration de l’accès aux services agricoles des producteurs. Ces services s’inscrivent dans une chaîne de services diversifiés impliquant les acteurs participant aux filières, et vont de la formation technique et économique des producteurs à la promotion commerciale des produits agricoles en passant par la diffusion de techniques de production et de post-production plus performantes, l’organisation des producteurs et l’accès au financement. Dans ce cadre, la coordination devient un enjeu central pour co-construire l’accès aux services via des partenariats public-privé ou d’autres formes de relations contractuelles associant les acteurs publics, privés et associatifs locaux (notamment les OP). Les petits producteurs familiaux constituent les cibles principales, au moins à court et moyen terme. Le développement agricole (surtout vivrier) et la sécurité alimentaire sont étroitement liés à leur évolution. Le soutien à leur égard est donc crucial pour faciliter leurs liens avec les acteurs des filières en amont et en aval, afin de stimuler leur productivité.
  • Place et rôle de l’industrie agroalimentaire : Accorder un intérêt plus affirmé à la place et au rôle de l’industrie agroalimentaire dans les chaines de valeur alimentaire constitue un enjeu important, en particulier au regard de sa contribution à l’emploi, à la sécurité́ alimentaire et à la réduction de la pauvreté́ tant en milieu rural qu’en milieu urbain. Il s’agit d’abord de mettre en œuvre une stratégie claire et complémentaire entre les quatre acteurs du secteur : les micro-, petites, moyennes et grandes entreprises agroalimentaires. L’intermédiation financière, des mesures incitatives en direction du secteur privé, l’intégration des producteurs et industriels locaux dans les chaînes de valeur, le renforcement des capacités de transformation et le transfert de technologies alimentaires, sont autant d’actions essentielles pour renforcer l’industrie agroalimentaire et sa place dans l’économie alimentaire en particulier et dans l’économie nationale en général.
  • Changement climatique et résilience : Le changement climatique (CC) a des effets sur tous les aspects de la sécurité alimentaire et de la nutrition, de par son incidence sur la disponibilité de l’eau, les cultures, l’élevage, les forêts, les pêches et le fonctionnement des écosystèmes dans leur ensemble. Les projections du GIEC indiquent une baisse moyenne de la productivité allant de 2 % en 2020 à 25 % en 2050, qui impactera toutes les cultures et régions agroécologiques (en Afrique sub-Saharienne) à des degrés divers. Particulièrement vulnérables aux impacts du CC, les petits producteurs familiaux constituent une priorité de par leur rôle fondamental en matière de sécurité alimentaire. S’ils ont toujours dû et su développer des stratégies pour faire face aux aléas climatiques et répondre à des conditions de production difficiles, l’ampleur et la rapidité du CC imposent cependant de les assister pour innover et investir davantage dans des modèles d’agriculture plus résilients. Ceux-ci reposent sur des actions concrètes en faveur de mesures d’adaptation et d’atténuation des menaces liés au CC, prenant en compte les réalités locales et s’appuyant sur les savoir-faire locaux et des résultats et expériences issus de la recherche appliquée et d’autres sources. Des pratiques agroécologiques appliquées à l’échelle des exploitations et des espaces ruraux font de plus en plus consensus, du fait de leurs effets bénéfiques à la fois agronomiques, environnementaux, économiques et sociaux.

Le changement climatique a des effets sur tous les aspects de la sécurité alimentaire et de la nutrition

Politiques et Programmes : entre volontarisme et dispersion des efforts ?

La Politique Nationale de Développement de l’Agriculture (PNDA) – Vision 2015 fait suite à la stratégie de développement de l’agriculture guinéenne dictée par la Lettre de Politique de Développement de l’Agriculture et la Lettre de Politique de Développement de l’Élevage. La nouvelle stratégie devrait contribuer à la réduction de la pauvreté́, l’amélioration de la sécurité alimentaire, la diversification des productions vivrières et commerciales, la réduction des importations de riz, l’amélioration de la balance commerciale et la protection de l’environnement. Elle s’articule autour de l’amélioration de l’efficacité et l’efficience des exploitations agricoles (notamment familiales) et des marchés, de la promotion de l’entreprenariat agricole grâce à la stimulation de l’initiative privée, de l’amélioration de l’accès aux marchés national, sous-régional et international des produits agricoles et de l’assurance d’une gestion durable des ressources naturelles et de l’environnement.

 

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